Des centaines de migrants anonymes se noient en Méditerranée dans les flots de notre indifférence. L’émotion soulevée ne dure que le temps d’une vague et de quelques paroles pieuses d’une pseudo-révolte qui ne touche à rien de notre confort et n’empêche pas de profiter des jours ensoleillés de ce début de printemps.
À l’heure où le départ de l’Hermione sur d’autres flots délivre notre imaginaire, nous nous suffisons du constat impuissant d’un drame qui ne touche qu’à notre conscience protégée.
Mais qui sommes-nous pour s’en tenir à si peu ? Combien d’entre nous issus eux-mêmes de l’immigration ? Combien d’entre nous qui ne cautionnons pas la bonne conscience des colonialistes et qui dénonçons ailleurs la surexploitation des ressources et des hommes au profit de quelques-uns ?
Quel visage ont-ils
dans la face de l’eau
dans l’ombre de l’oubli ?
Ils voyagent
dans le flot rapace de l’esclavage
Quel cœur ont-ils
dans un temps rapiécé
dans les grilles de la mort ?
Ils voyagent
ils meurent à la une des journaux
Quelle valeur ont-ils
sur le marché des passeurs
dans le temps exploité ?
Ils voyagent
dans le visage du malheur
Quel nom ont-ils
sur les murs de la mémoire
dans le silence des consciences ?
Anonymes ils s’embarquent
Anonymes ils naviguent
Anonymes ils se noient
Anonymes ils s’oublient
Bibliographie
-
Laurent Gaudé, Eldorado, © Actes Sud/Babel, 2006
- Marie NDiaye, Trois femmes puissantes, © Gallimard/Folio, 2011
Internet
- Le billet de François Rollin du 21 avril 2015 sur France-Inter : On fait aller…
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