Jean-Louis Guitard est un créateur qui ne se refuse rien. Auteur de plus de 30 pièces de théâtre et de plus de 900 chansons, il est un peintre dessinateur reconnu. Ses œuvres à l'encre de Chine se retrouvent dans des collections privées et publiques. Né en 1939 à Antibes, il ne cesse de multiplier les créations avec entrain explorant toutes les parts de son existence.
C'est ici un recueil de poèmes qui nous intéresse, Noirs sourires, publié par l'association Hélices poésie dans la collection Poètes Ensemble !. En quatrième de couverture Daniel Lemaire écrit : « Ses textes poétiques sont le reflet de ce qu'il est profondément. Il y joue et y fait jouer l'amour, l'évanescence des instants, la mort, les attentes, tous les sentiments profonds, à travers un voile de dérision, une forme de rire, un recul de chaque instant, un invraisemblable sens de l'absurde, une sensibilité et une personnalité uniques. »
Jean-Louis Guitard dit souvent qu'il a de moins en moins de certitudes et il affiche une lucidité incrédule. Ses textes manifestent cette incrédulité à travers un sens de l'absurde remarquablement maîtrisé. Construits le plus souvent en boucle et faits pour l'oralité, ils discourent de vers brefs en vers brefs, de jeux sur la chronologie et l'espace, de mots uniques en expressions originales. Il y a là une invention personnelle incontestable, le masque du rire pour le refus du désespoir.
Je ne sais plus très bien…
Je suis parti demain
pour un pays de rien
ou de quelque chose…
Je ne sais plus très bien.
Je m'installerai hier
avec mon fer
à repasser le temps froissé
ou déchiré,
ainsi qu'avec mon râteau
à ratisser les cœurs
et tout le reste…
Ma veste
est décousue,
moi
non plus…
La Tour Eiffel
et la tour de Babel
seront bientôt construites…
La pêche à la truite
est autorisée neuf jours par semaine…
Les étoiles sont plates
et servent de plateau
à la fille
qui me rejoins
dans mon bain
de raisin noir et d'abricot.
Il fait un superbe temps d'orage
Je nage
sur la fille,
dans la baignoire,
dans les rigoles de l'orage,
et dans les océans
du temps.
Il est trop tard pour reculer.
Ce qui sera enfin dit
a été fait…
et je vous écris
pour vous dire
que je suis parti
demain
pour un pays
de rien
ou de quelque chose…
je ne sais plus très bien…
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PPierre KOBEL
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