En juin 2011, les éditions L'Oreille du Loup ont publié une anthologie poétique de Volker Braun, Le massacre des illusions – Das Massaker der Illusionen. Volker Braun est un auteur majeur de la poésie allemande contemporaine.
Il est né le 7 mai 1939 à Dresde. À la fin de ses études secondaires, il entreprend des études de journalisme mais très vite son attitude contestataire le conduit à être tour à tour apprenti imprimeur, terrassier, conducteur d'engins dans le Kombinat d'extraction du lignite à Schwarze Pumpe.
En 1965 il collabore au Berliner Ensemble où sa première pièce est interdite. Malgré les difficultés il sera reconnu comme un des auteurs les plus originaux de la RDA par sa poésie dès son premier recueil Provokation für mich (1965) comme par son théâtre, ses récits et ses essais. Il fait partie de la « vague de la jeune poésie » avec d'autres jeunes auteurs tels Sarah et Rainer Kirsch, Karl Mickel, Heinz Czechowski, Kurt Bartsch. C'est un écrivain engagé qui n'a pas hésité à traiter du socialisme et à le remettre en cause tel qu'il est vécu dans son pays, s'interrogeant sur les causes de son échec ce qui lui vaut d'être surveillé par la Stasi. En 1976, il signe la pétition contre l'extradition de Wolf Biermann. En 1982, il quitte l'association des écrivains de RDA..
« Volker Braun se présente à nous comme un contemporain perspicace et implacable, qui connait bien son style ardent, comme il l’appelle, et dont le tempérament est en même temps doux et plaisant. Son talent satirique a encouragé à tourner en dérision de nombreuses injustices. Mais Braun ne s’est jamais considéré comme quelqu’un de supérieur, il se rebelle au contraire et compatit avec autrui. » écrit Erdmut Wizisla, directeur des archives Bertolt Brecht. Il fait ensuite des études de philosophie à Leipzig.
Il a reçu de nombreux prix littéraires dont le prix Lessing en 1981, le prix de Littérature de Brême en 1986 ou encore le Prix Büchner en 2000. Après la chute du mur, il entreprend une réflexion sur les raisons de l'échec de la RDA et dans cette optique, il collabore à la revue Das Argument. En 1994 il est l'invité de l'Université du pays de Galles. Depuis 2006 il est le directeur de la section littérature de l’Académie des Arts de Berlin.
Le massacre des illusions regroupe plus de quarante poèmes extraits de trois recueils : Lustgarten, Preussen, Ausgewählte Gedichte paru en 1996, Tumulus paru en 1999 et Auf die schönen Possen paru en 2005 aux éditions Suhrkamp. Les traductions sont assurées par Jean–Paul Barbe et Alain Lance.
Photo de Volker Braun © Florence Trocmé
Aus dem dogmatischen Schlummer geweckt
Hast du die Nacht genutzt ? – Ich übte mich
In der Erwartung. – Wessen ? – Kennst du auch
Den süben Schmerz, die Unbekannte lieben ? –
Die Unbekannte Tat ? – Wie ? – Wovon sprichst du ? –
Die Adern sprangen fast in meinem Fleisch.
Wie bin ichs müd, den Markusplatz zu queren. –
Du träumst, nicht wahr, du träumst mit Konsequenz.–
Und auf den Straß weht die Transparenz.
*
Tiré du sommeil dogmatique
Qu'as tu fait de ta nuit ? – Je me suis exercé
À l'attente. – De quoi ? – Connais-tu aussi
Cette douce souffrance : aimer l'inconnue ? –
L'action inconnue ? – Comment ? –De quoi parles-tu ? –
Mes veines explosaient presque dans ma chair.
Comme je suis las de traverser la Place Saint-Marc.–
Tu rêves, n'est-ce pas, tu rêves avec constance. –
Et dans les rues marche la transparence.
in Le Massacre des illusions , © L'Oreille du Loup, p.34-35, traduction Alain Lance
Die Kunst
Sie tanzt auf den Gräbern, mit Grazie
Mit ihrem wilden Gedächtnis.
WIR KÖNNEN JA NICHTS BEHALTEN. Sie
Ruft die Verreckten herauf, die Vergessenen
Mit ihren Messern und Forderungen. Erloschene
Liebe, kalter Zorn, vertane Zeiten. Was
Ist der Gedanke, daß wir sterblich sind
Gegen das GROSSE UMSONST. Sie wagt es zu denken
Im Untergrund, wo alles lebt.
Wie, ist es möglich ? Daß die Verhältnisse tanzen
*
La poésie
Elle danse sur les tombes, avec grâce
Avec sa mémoire sauvage.
AH ! NOUS NE POUVONS RIEN RETENIR. À son appel
Se lèvent les crevés, les oubliés
Avec leurs couteaux, leurs exigences. Amour
Éteint, colère froide, temps gâchés. Qu'est-ce
Que penser : nous sommes mortels
Face au GRAND POUR RIEN. Cette pensée, elle l'ose
Sous terre, là où tout vit.
Comment est-ce possible ? Faire danser l'état des choses
in Le Massacre des illusions, © L'Oreille du Loup, p.104-105, traduction Alain Lance
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