Depuis longtemps Jean Gédéon accompagne l'aventure de Hélices Poésie et ses contributions à la vie de l'association, à la tenue des recueils et revues qu'elle édite sont toujours généreuses et de qualité.
En 2008 dans le cadre du projet musical Héliopolis, ce titre, dont il est l'auteur, à écouter :
En 2005, dans la collection Poètes ensemble ! était publié le recueil Corpus dont voici quelques textes.
Contre-chant
Tu rêves de calme et de sérénité
des douceurs de la mer et de son chant
d'oiseaux.
Du violet des oursins.
Pour oublier quelques secondes
machettes et garrots
les cimetières insatiables
et leurs grands champs de ruines.
Dans les lueurs intermittentes
de la folie ordinaire.
*
Tu aimais que se farde la distance entre les pierres.
Qu'elles se tiennent bien serrées
dans la chaleur crissante de leur rugosité,
quand tes pas parallèles sur ces chemins d'errance
les emplissaient d'effroi.
Yeux bandés tu allais de l'avant.
Mais elles seules dans leur obscurité
connaissaient l'épilogue.
*
On effleure d'une main vaine
les naïves croyances d'autrefois
déboulonnées et jetées à la casse,
leur masque de fer et de soie.
Les vieilles certitudes
endormies.
La vérité précaire
sur son coussin de plumes.
Emmanuel Berland et Geneviève Deplatière ont voulu par les textes suivants témoigner de leur amitié pour Jean Gédéon.
Provende
pour Jean Gédéon
Ils sont longs les quatre temps de la terre et du ciel
dans ce monde sans initiale ni fin
l'homme sauvage et feuillu que je suis devenu,
vêtu de la nuit des temps
s'attarde en riches semailles - et rien ne vient
Celle qui a pouvoir sur les grains
qu'elle déplace son urne dans le ciel,
qu'elle déploie les gigantesques roues
et que le jour si haut s'élève
nous laissant l'infini tout de suite, anthracite
et velours noir
Je suis dans les mêmes draps
pourvoyeurs d'abondance
comme un pauvre laboureur avec sa reine
de véraison
*
Fable avec homme
pour Jean Gédéon
Le voyage rétrécit les sens
mais l'homme s'allonge
jusqu'à devenir proche
des grottes dont il sentait
confusément la candeur
Il parle aux inanimés, croit
en ce qu'il veut
les couleurs pures
les fruits et leur ombre
Faire est refaire, il s'abstient
il creuse des trous dans le
temps, en lui-même
puis il refroidit longuement
*
Mouvement facial
pour Jean Gédéon
Homme de sucs et de nords
le sourire dépasse de sa face
les blés le rencontrent, des mégalithes le dressent
à être sans visage
impossible de se transformer ni la nuit
ni le jour d'ailleurs il préfère
disparaître
au milieu du champ de pierres
un profil sort de l'enclume
s'échappe de la face et c'est un projectile
invulnérable, une danse qui guérit
*
Animal d'écriture
pour Jean Gédéon
Le noir est derrière lui et la lumière
sur lui. Il sait voler, il est incassable
même sous la caresse
Il s'enroule dans une feuille de nénuphar
et dérive au soleil
Plus tard, c'est ainsi que seront griffonnés
à même la sève
ses jurons, ses plaintes, ses louanges
*
Pour ampliation
pour Jean Gédéon
N'hésite pas à miser sur un cheval qui ne sait que danser
sur la corde raide sans public
L’habitude de fleurir te le rendra
au centuple
en bons onguents, à disséminer hors
du coffre, en hymnes
à offrir aux loups de rencontre
Des pas sur la rivière, l'ombre unique de ce que
tu dois laisser
Emmanuel Berland
*
Interlude
Qu'apporterons-nous
de l'autre côté du monde ?
Notre poids de peines et déraisons
nos prières notre résistance
un peu de rêves aussi et même quelques mots
autour de l'inouï
Quant à la gratitude
avons-nous été assez prodigues ?
On dirait
que tu tailles encore ton crayon
pour ce que l'on ne saura
jamais ...
Tu utilises le firmament
comme toile de fond
Tu entres dans le tableau
Tu enjambes l'interrompu
lèves le flambeau
Et voilà qu'apparaissent l'arène le taureau
ton rire élémentaire et le rayonnement du sang
Geneviève Deplatière
PPierre Kobel
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