Claude Louis-Combet est né à Lyon en 1932.
Son père est mort en 1937 et il a été élevé par sa grand-mère maternelle, dans un environnement exclusivement féminin.
Il suit des études secondaires dans des petits séminaires de missionnaires. En 1950, il entre en religion chez les Pères du Saint-Esprit. Il suivra un an de noviciat puis deux années de philosophie à l'Abbaye Blanche à Mortain (Manche). En 1953, il rompt avec la vie religieuse.
De 1954-1958, il fait des études supérieures de philosophie à la Faculté des Lettres de Lyon. Son maître intellectuel est le phénoménologue Henri Maldiney.
De 1958 à 1992, il est enseignant à Besançon, d'abord comme professeur de philosophie dans un lycée, puis pendant vingt-cinq ans comme directeur d'un centre de formation d'instituteurs spécialisés pour les classes d'enfants en difficulté.
Entre 1958 et 1964, il écrit des articles de psychopédagogie dans des revues publiées par l'École Moderne (mouvement Freinet).
Claude Louis-Combet est poète, penseur. Ses textes déjouent les catégories car il parvient à exprimer en des formules saisissantes des pensées profondes où des images dont le corps (la chair) creuse en chaque lecteur une veine ou une rigole. D’évidence s’écrit la profondeur d’une pensée qui constate la perte. De l’identité, de l’unité originelle que l’écriture tente de garder en son sein. La formulation poétique ne peut retrouver le cri, tout ce qui est retenu en l’intériorité (l’antériorité d’un temps perçu comme entier). La fuite, le morcellement, les fragments sont la figuration du destin humain. Et Claude Louis-Combet puise dans la mythologie, par exemple, pour exprimer la perte et la condamnation (forcée) du projet d’écrire. Il se fonde également sur les légendes chrétiennes pour exprimer la quête de spiritualité à la source de l’écriture. Seule entreprise, malgré tout, capable pour lui de figurer la construction.
« Toute mon œuvre se rattache à un certain projet autobiographique esquissé dans mon premier ouvrage, Infernaux Paluds (1970). D’abord soutenue par mon désir de configurer les expériences majeures de mon enfance et de mon adolescence afin d’en dégager une signification, l’écriture s’est révélée être l’espace d’une projection continue de rêveries, de fantasmes, de réminiscences mythiques, en étroite relation avec le vécu affectif. Dans les années 1980, j’ai avancé le concept de mythobiographie pour désigner le produit littéraire osmotique associant en un tout, par la phrase, les expériences émotionnelles individuelles et la trame mythologique ou hagiographique du récit. Ma conception du roman est essentiellement poétique et onirique. L’objectif des essais est de rattacher l’entreprise d’écriture à ses fondements existentiels. L’ensemble de l’œuvre révèle une forte connotation psychanalytique, religieuse et philosophique, dominée par le souci du traitement esthétique de la langue. »
C’est ainsi que se présente Claude Louis-Combet sur le site du Centre Régional du Livre de Franche-Comté.
Il était une fois une petite fille si belle qu’elle mourut.
Où ai-je lu ou entendu cette phrase ? Je ne sais plus. Mais comme quelques autres paroles essentielles dont la source appartient à la nuit de la mémoire, celle-ci fait partie de moi-même. Peut-être suis-je loin d’en saisir toute la signification. Il en est de ces mots comme d’un mystère dont l’initiation ne cesse jamais. La vie semble trop courte et trop dispersée pour en venir à bout – et cependant c’est d’une telle pensée qu’elle reçoit sa lumière.
Chaque fois que le singulier hasard des rencontres m’a exposé à la beauté du monde, j’ai éprouvé ce qu’est celle-ci, en son fond : sa radicale fragilité, sa vulnérabilité au temps, son essentielle désolation d’être – et d’être si peu. Je suis de ceux que la beauté désespère.
La mort est une enfant in Le Petit Œuvre poétique, © Corti
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NOYAU CENTRAL
Lorsque les mots parviennent à leur sommet
Ils ont déjà brûlé
Le texte s’écrit
Dans les ponces et les basaltes
Je ne sais rien de ce que je suis
Je ne connais que les scories
Où va le doigt sur le chemin des signes
Obstiné à la phrase
Puisatier du verbe
Je n’ai de lien qu’avec l’opaque
Consumée – c’est toi qui portes le feu.
Petite géologie du cœur in Le Petit Œuvre poétique, © Corti
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Sans autre savoir étymologique que mon désir du sens des mots que j’aime, et rêvant sur leur charge de secret comme s’y prendrait l’amant, contemplant en l’épelant la forme de l’aimée, jusqu’à ce qu’elle révèle sa nature singulière de l’âme qu’elle tient close et celée, je lis dans l’insula du latin comme dans l’isola de l’italien, la racine de solitude qui a disparu de l’île du français. Et je tiens absolument à lire dans solitude, la conjonction, à l’infini, du soleil et de la terre, selon toute l’ambivalence du radical sol, le soleil, mais aussi le sol sur lequel nous marchons et que nous cultivons – radical qui est le même que solus, le seul, esseulé, solitaire, isolé, sola, au féminin, qui appelle, même s’il n’existe pas, pour dire l’île, le mot in-sola, l’intériorité ou territoire intérieur de celle qui est seule, en sorte que la voie est ouverte pour que l’île devienne, au féminin, la métaphore de la solitude. »
D’île et de mémoire, © José Corti
L'œuvre de Claude LOUIS-COMBET a fait l'objet de deux colloques universitaires : à Lille en 1995 et à Besançon en 1998.
Bibliographie
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Du sens de l'absence, © Lettres vives, 1985
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Le Péché d'écriture, 1990
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Ouverture du cri, © Cadex, 1991
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Dadomorphes & Dadopathes, avec 5 gravures de Dado, © Deyrolles,1992
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Augias et autres infamies, nouvelles, 1993
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Blesse, ronce noire, © José Corti, 1995
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L'Âge de la rose, 1997
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Le Petit Œuvre poétique, 1998
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Le Recours au mythe, 1998
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Proses pour saluer l'absence, 1999
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Le Chemin des vanités d'Henri Maccheroni, 2000
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L'Homme du texte, 2002
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Transfigurations, nouvelles, 2002
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Tsé-Tsé, © Flammarion, 1972
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Mémoire de Bouche, © La Différence, 1977
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Marinus et Marina, © Flammarion, 1979
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D'île et de mémoire, 2004
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Terpsichore et autres récits, © Fata Morgana, 2004
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Les Errances Druon, © José Corti, 2005
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Ouvertures, 2005 (Fata Morgana)
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L'Heure canidée, 2005 (Léo Scheer)
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Cantilène et fables pour les yeux ronds, 2006
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Visitations, 2006
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Grand siècle d'atopie, © Galilée, 2009
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La Sphère des mères, © José Corti, 2009
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Magdeleine, à corps et à Christ, sur huit photographies d’Élizabeth Prouvost - © Fata morgana, 2009
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Le Livre du Fils, © José Corti, 2010
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Des transes et des transis, © Fata Morgana, 2011
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Gorgô, © Galilée, 2011
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La Sœur du petit Hans, © Galilée, 2011
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À l'Escarcelle de Rêves, ill. de Pierre Bassard, © Æncrages & Co, 2011
À propos de Claude Louis-Combet
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José-Laure Durrande, Claude Louis-Combet, L'Œuvre de chair, Presses universitaires du Septentrion, 1996.
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Claude Louis-Combet, Revue des Sciences humaines, N°246, 1997.
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Autour de Claude Louis-Combet, Revue Prétexte, Carnet Hors-Série N°8, 1997.
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L'Œil de Bœuf N°16 est consacré à Claude Louis-Combet, 1998.
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Claude Louis-Combet, mythe, sainteté, écriture, Collection Les Essais, éditions José Corti, 2000.
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Revue Verrières, deuxième série, n°1, septembre 2004 : un important dossier consacré à Claude Louis-Combet (hommage qui lui a été rendu le 19 mars 2004 à la Maison de la France-Comté).
Sur internet
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Voir le dossier consacré à Claude Louis-Combet sur remue.net
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Entretien avec Ronald Klapa le19 mars 2004, à la maison de Franche-Comté
Contribution de Isabelle Lévesque
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