Il est né à Nantes en 1911. Il s’intéresse très tôt, pendant ses études secondaires à la poésie, commence à en écrire, et rend visite à Pierre Reverdy, à Solesmes. Ils garderont le contact et l’aîné écrira à son sujet : « Je vous suis depuis que vous êtes apparu, et je vous ai connu avant même que vous ayez la moindre idée de ce que vous étiez capable de faire. Et je vois toute la distance parcourue, l’étoffe qu’a prise votre personnalité, l’étiage de votre valeur. Vous le devez à la géhenne. C’est là que vous recevez votre trempe, et c’est cela qui donne à votre voix ce timbre, cet accent qu’elle n’aurait jamais eus si vous aviez trouvé, devant vous, le chemin ouvert et facile ; c’est cela aussi qui fait de vous le meilleur, le plus fort, le plus profond des poètes de votre bord. Vous savez, rien ne vaut d’être écrit d’une main non jaillie d’une source de sang. »
Tour à tour bouquiniste, professeur de lettres, journaliste, producteur de radio, il aura connu, jusqu’à son décès en 1984, une existence sans concession, marquée par des soucis de santé, impécunieuse et difficile, mais entièrement vouée à la poésie.
Il fera, un jour, dans sa librairie, connaissance d’un tout jeune homme qui écrit aussi de la poésie, appelé René-Guy Cadou, future étoile filante poétique de l’École de Rochefort. Et pendant la sombre période de guerre, il rejoindra régulièrement ses amis poètes chez Jean Bouhier à Rochefort. Il fut par ailleurs un proche ami de Max Jacob.
Sa poésie est élégiaque, spirituelle et toute de grâce mélancolique, et ainsi que l’a écrit René Bertelé : « Les poèmes de Michel Manoll ont la grâce triste et pensive de ces visages d’enfants malades, habitués à garder la chambre, les yeux fixés sur la fenêtre… Parfois ce visage s’enfièvre et s’exalte, jusqu’à refléter avec plus d’ampleur le drame intérieur ; le poème a rempli alors sa mission, toute de libération. »
O SOLAIRES FORETS
Je vous entends frémir tout au fond de mes os
O solaires forêts ployant sous le fardeau
D'une chair indocile et toujours renaissante
Et c'est votre ramure étrange et frémissante
Qui s'élève en crissant des failles de ma peau
Si je cherche à gagner parmi les arbrisseaux
La cime dévorée de lueurs et de neige
D'où l'on perçoit le vaste espace que n'allège
Ni le duvet du temps ni l'aile d'un oiseau
In Le cri d’os, n° 29/30
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J’entre ce soir dans la maison déserte, sous les pins.
L’ombre a tout saccagé. Cependant, je reviens
Tout seul, comme autrefois je marchais sur la plage,
Ignorant, ignoré des amis de mon âge.
À l'heure où les cafés bourdonnent comme un nid
De frelons, je regagne un des ports de ma vie.
Voici le chemin pluvieux et la barrière blanche
Et le sol tapissé d'épaves et de branches ;
Quelqu'un m'attendait là : un visage de sable,
Quand je rentrais, traquant une meute d'étoiles.
Je t'appelle, visage, et voici que le vent
Chante, comme il chantait sous les pas du printemps.
J'ai franchi tant d'espace et rompus tant de liens
Que je ne sais plus trop qui je suis, d'où je viens ;
(…)
In Le voyageur de l’aurore, © Granit, 1986
Bibliographie poétique
- À perdre cœur, © Sagesse, 1936
- La première chance, © La Hune, 1937
- L'air du large, © Cahiers de Rochefort, 1941
- Gouttes d'ombre © Robert Laffont, 1944
- Astrolabe © Les Amis de Rochefort, 1945
- Le modèle nu, avec des dessins de Roger Toulouse © Les Bibliophiles alésiens, 1947
- À l'invisible feu, © Les Bibliophiles alésiens, 1949
- Louisfert-en-poésie, © Les Amis de Rochefort, 1952
- Oratorio-Cantate-"Les Cinq Plaies", poèmes de Michel Manoll, musique d'Elsa Barraine-Concert au théâtre des Champs Elysées, 1953
- Thérèse ou la solitude dans la ville © Seghers, 1953
- En ce lieu solitaire © La Tour de feu, 1956
- Le vent des abîmes, © Revue Source, illustré par Guy Bigot, 1958
- Souviens-toi de l'avenir, © Jean Germain, prix René Laporte, 1962
- Incarnada © Seghers, 1968
- Un été andalou, © Rougerie, 1980
- Le voyageur de l'aurore, © Granit, 1986
- Rhapsodies des quatre saisons, © Rougerie, 1988
- Si transparente était la source, © La Bartavelle, 1989
- Une fenêtre sur le monde, © Les Cahiers de Garlaban, 1990
- L'espace est ma demeure, © Rougerie-Poésie Présente, 1991
- Louisfert-en-poésie, © Réédition-Maison de Poésie, 1992
- Solaire solitude, © Les Cahiers de Garlaban, 1994
- Si proche du silence, © Cahiers Bleus, 2002
Internet
- Le site consacré à Michel Manoll
- Un article Wikipedia
- Sur le site de L'oiseau de feu de Garlaban
- Le Fonds Michel Manoll à l'Université d'Angers
Une contribution de Jean Gédéon
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