La Cité de la musique à Paris présente jusqu’au 15 janvier 2012 l’exposition Paul Klee, Polyphonies, confrontant l’artiste peintre des poèmes en couleurs à son double, interprète et fervent mélomane. Une occasion rare de parcourir l’univers sonore d’un peintre qui fut partagé entre figuration et abstraction, avec la musique comme principale source d’inspiration.
Paul Klee (1879-1940), né à Berne dans une famille de musiciens, joue du violon dès l’âge de 7 ans et fréquente assidûment les salles de concerts et les opéras. Alors qu’une carrière musicale s’offre à lui, il choisira pourtant l’aventure picturale, inédite dans sa famille. Après 15 ans de travail constant, où la musique lui sert en même temps de gagne-pain et de nourriture intellectuelle, il affirme en 1914, à son retour de Tunisie « Je suis peintre ! ».
En contact avec les peintres Franz Marc, Kandinsky et le compositeur Schönberg au Blaue Reiter (Le Cavalier Bleu) à Munich, Robert Delaunay à Paris, et le groupe Dada à Zurich, il s’oriente de plus en plus vers une construction « polyphonique » de la couleur. En 1920, invité par Gropius, directeur du Bauhaus de Weimar, où il rencontre Stravinski et Bela Bartok, il approfondit et conceptualise ses recherches sur la transposition des principes de l’écriture musicale en peinture. Naissent alors ses « tableaux échantillons », qui, à partir des transparences de l’aquarelle, répètent les motifs en les faisant divaguer à la manière d’un contrepoint de J.S. Bach.
En 1930, il poursuit à l’Académie de Dusseldörf ses recherches sur un nouveau langage « polyphonique » ; mais en 1933, à l’arrivée d’Hitler, il doit retourner à Berne. En 1935, la maladie l’oblige à renoncer à la pratique du violon.
L’exposition montre combien l’œuvre de Paul Klee est plurielle. Et le concept musical de polyphonie reflète bien cette diversité. Des tableaux aussi célèbres que Fugue en rouge ou Harmonie de quadrilatères en rouge, jaune, bleu, blanc et noir en témoignent. De plus, l’originalité de cette exposition tient au fait qu’un parcours musical, par audioguide, accompagne le visiteur, lui permettant de rentrer plus avant dans l’univers sonore du peintre.
Fugace
Tiens, purpurine. Tiens,
pomme, extrémité de sexe,
bouteille de vernis, fuchsia.
Attrape un peu de chaud.
Éclaire auprès, au loin,
L'étroitesse de l'heure heureuse.
Petit tracé de briques
à suivre pied à pied
dans le corps, hors du corps
jusqu'à pomme croquée
sexe encapuchonné
vernis cassé, fuchsia flétri.
Tiens, l'éclair. Je me cramponne à toi.
In Rituel d'emportement, Mouvantes (1991) © Obsidiane et le Temps qu'il fait 2002 p.173
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Sur la face invisible de la lune
quelqu'un joue du piano
très doucement
près de lui est assis un chien
de la tendresse plein les yeux
près de lui un pommier
atténue le bruit de chute de ses pommes.
Ils ont oublié ce qu'ils étaient sur la terre
peut-être ont-ils voulu
passionnément
connaître l'autre côté des choses
peut-être les a-t-il déçus.
Mais la musique reste
celle qui était là, et qui demeure.
in Entre marge et présence © Les Écrits de nord Éditions Henry p115
Contribution de Jacques Décréau et Roselyne Fritel
Paul Klee selon ses propres titres en 1939
Ex timbalier
Ex pianiste
Ex harpiste
Ex chanteur-bouffe
Ex musicien
Vieux violoniste
Spectre musical
Mais quel magicien !
merci de nous avoir conviés à voir cette expo Roselyne Fritel
Rédigé par : Roselyne Fritel | 04 janvier 2012 à 11:04