Visiter l'exposition Giacometti et les Étrusques, qui se tient actuellement et jusqu'au 8 janvier 2012, à La Pinacothèque de Paris, près de la Madeleine, c'est prendre le risque de tomber sous le charme d'une civilisation, vieille de 1.200 ans avant J.C.
Le sculpteur Alberto Giacometti en fit l'expérience, en 1950, lors de la grande exposition au Louvre de 1955, rencontre décisive pour l'orientation de ses recherches esthétiques, qui l'amena à en savoir plus sur cette civilisation et à en visiter les vestiges dans les musées italiens à deux reprises.
Aujourd'hui, vient à nous pour la première fois, la petite sculpture d'adolescent, nommée très poétiquement, peut-être par Gabriel d'Annunzio, L'Ombra della sera .
L'ombre du soir, dans sa vitrine, flanquée de deux acolytes, à sa gauche, une Femme debout de Giacometti, à sa droite, un offrant étrusque, couronné de fleurs et à leurs pieds, les ombres qui les entourent, ne manqueront pas de vous retenir un long moment, comme tant d'objets votifs de cet art étrusque raffiné, chargés d'humour et de poésie .
Dès la première salle, la Canope à bras, porteuse de cendres, de la période orientalisante, fin du VII° siècle av. J.-C, venue du musée archéologique de Florence vous tendra les bras, mains délicates, visage silencieux, au dessus d'un réceptacle d'argile, brisé et patiemment recollé.
À cet objet rituel, comme à L'Ombre du soir, fait mystérieusement écho ce poème de José Ensch (1942-2008) paru dans L'Aiguille aveugle, Suites... © Phi 2008 p.166/167
Elle est toujours à gauche
la page de l'épaule, ses lumières passant
comme des ombres jeunes
sur la solitude agrandie
Le cœur du milieu s'en émeut
ô sortilèges du seul soleil
corps athlète au repos
qu'aucun autre corps ne sollicite ni ne veille
Vertiges de chair
dans les galbes du deuil !
Les images sont luisances fragiles
sur la rétine rétrécie
et rétives les nuits
à venir sur sa peau
constellée de fêlures d'autrefois
ces voilettes si fines...
Il y aurait les rameaux de deux bras
au bout du temps,
la table où s'accouder
et cette encre qui ne sécherait jamais
sur les pages de l'air.
Internet
- L'exposition sur le site de la Pinacothèque
- Un film de Jean-Marie Drot sur Giacometti
Contribution de Roselyne Fritel
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