Miguel Zamacoïs (1866-1955)
Sept ans
C'est un petit garçon, c'est un petit bonhomme
Heureux de rien, de tout, d'un bâton, d'une pomme,
Un petit garçon de sept ans.
Il a des yeux rieurs, des cheveux en crinière,
Il est fier, car depuis la semaine dernière,
Il sait siffler entre ses dents
(…)
Des amusements neufs, on n'en invente guère
Étant petit garçon, il s'amuse à la guerre
Comme tous les petits garçons...
Il s'amuse d'instinct à défendre sa terre
Et partage déjà la haine héréditaire
Pour ceux-là que nous maudissons.
Or, voici qu'un matin, à travers le village,
Passent les ennemis, avec tout l'étalage
De leurs procédés révoltants.
On se bat, c'est l'assaut du droit contre la ruse
Bah ! Est-ce une raison pour que plus ne s'amuse
Un petit garçon de sept ans ?
Et parce qu'il faut, à sept ans, que l'on joue,
Du côté des soldats le petit met en joue
Son fusil de bois menaçant
Un français eût souri du geste minuscule
Et peut-être singé l'ennemi qui recule
Pour amuser l'innocent
Vous, salissant d'un coup toute votre campagne
Mais vous n'avez donc pas d'enfants en Allemagne
Pour montrer que vous étiez forts
Vous avez dirigé contre l'arme enfantine,
Qu'il allait déposer pour prendre sa tartine,
Les vrais fusils qui font les morts
S'il est vrai , Majesté, ce crime qu'on raconte,
Comme il pèsera lourd, le matin du grand compte,
Pour le débiteur aux abois !
Comme il pèsera lourd, lorsque dans le silence,
Une main posera l'enfant sur la balance,
Et son petit fusil de bois !
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Ernest Pépin
Le goût de l'enfance
J'ai regardé son visage
Ce n'était pas un visage
C'était une promesse espiègle
Et ce que je prenais pour des yeux étaient les puits de l'émerveille
L'air autour de lui avait l'ivresse des libellules
Et les guêpes étaient douces
Le monde semblait une goyave mûre
Une chasse aux trésors
Et de la terre montait un parfum de fourmis rouges
Les poux de bois gonflaient la panse de l'arbre,
J'ai bien regardé son visage
J'ai vu que c'était moi
Malgré les larmes
Malgré la mort quelconque d'un vieux crapaud
Dans une mare
C'était moi flottant comme une feuille
Dans l'enfance
Peut-être que je n'étais pas un enfant
Peut-être que je jouais tout simplement
Le monde des miracles
Me servait de jouet
Je sifflotais le monde
Les lucioles festoyaient dans mes mains
C'était cela l'enfance
Quand je prenais la vie pour un conte plus vrai
Que le chuchotement des étoiles
Poème inédit. In Enfances, © Bruno Doucey, 2012, p.118
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Alain Serres
L’école maternelle
Plouf plouf !
L’école maternelle
à la béchamel
a perdu son p’tit panier
pour aller nous ramasser.
Tant pis pis pour elle
tant pis pis pour lui,
aujourd’hui c’est mercredi.
In Salade de Comptines, © Rue du Monde 2003
Contribution de PPierre Kobel
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