Si vous saviez, passants, attirés
Par d’autres regards charmants
Que le mien, que de feu j’ai brûlé,
Que de vie j’ai vécu pour rien,
Que d’ardeur, que de fougue donnée
Pour une ombre soudaine ou un bruit…
Et mon cœur, vainement enflammé,
Dépeuplé, retombant en cendres.
Ô, les trains s’envolant dan la nuit
Qui emportent nos rêves de gare…
Sauriez-vous tout cela, même alors,
Je le sais, vous ne pourriez savoir
Pourquoi ma parole est si brusque
Dans l’éternelle fumée de cigarette
Et combien de tristesse noire
Gronde sous mes cheveux clairs.
In Le ciel brûle, © Cahier des brisants, 1987
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La vie ment inimitablement :
au-delà de l’attente, au-delà du mensonge…
Mais au tremblement de toutes les veines
tu peux reconnaître la vie !
Comme couchée dans l’orge : une cloche, l’azur…
(Comment ! couchée dans le mensonge!) – la chaleur, le mur…
Bredouillement, à travers le chèvrefeuille, de cent dards…
Réjouis-toi donc ! – Il appelle !
Et ne me reproche rien, mon ami.
Nos âmes sont ensorcelées dans
nos corps, et déjà le front s’égare dans le rêve.
Car – pourquoi as-tu chanté ?
Dans le livre blanc de tes silences,
dans l’argile sauvage de tes « oui » –
j’incline doucement la fondrière du front :
car ma paume est la vie.
In Après la Russie, © Rivages Poche, 1993
Bibliographie partielle
- Linda Lê, Marina Tsvétaïéva, © Jeanmichelplace/poésie, 2002
- Henri Troyat, Marina Tsvétaïéva, L'éternelle insurgée, Livre de Poche, 2003
- Marina Tsvétaïéva, Mon frère féminin, Mercure de France, 2007
Internet
- Dans La Pierre et le Sel, Marina Tsvétaïéva, l’oiseau-Phénix, une contribution de Jacques Décréau
- Marina, Marina, ma sœur la vie sur Esprits Nomades
Contribution de PPierre Kobel
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