Nos enfances à jamais perdues toujours là
nos histoires d’amour englouties par l’amour
cette révolte têtue devant les désastres du même
les désastres du monde qui n’en finissent pas
absurdement mortels
(voilà ce que nous sommes)
un désir fou de vivre
In Comme une promesse abandonnée, © Bruno Doucey, 2019, p.11
Il y a de l’incandescence dans la réserve de Mireille Fargier-Caruso. Derrière l’émotion, c’est le monde entier qui est sollicité, interrogé. Les fractures du siècle, les fatigues de l’âge qui passe sont le sujet de son écriture dont Jean-Marie Barnaud écrivait : « ce souffle qui ne cesse de tenir sa note juste, qui ne cède jamais à la tentation de briller, qui réussit à dire, dans la simplicité et dans la fermeté, le passage du temps, et la déchirure qui s’augmente de jour en jour entre les choses, les êtres et nous-mêmes. » C’est dans cette justesse, cet intime revisité que Mireille nous tient et nous aide à vivre. Malgré tout !
La Pierre et le Sel : Quel est l’itinéraire personnel qui t’a conduit à la poésie ? Culture familiale ? Rencontres personnelles ? Études ?
J’étudie d’abord et j’enseigne la philosophie, je suis dans ce qu’on croit être « le rationnel ».
Je lis Bachelard : pour lui philosophie et poésie sont comme deux axes complémentaires. Je m’intéresse peu à peu à la poésie, dans un premier temps sans écrire, en lisant de nombreux poètes : de Rimbaud à Ritsos, de Jabès à Elytis, du Bouchet, Esteban, Noël… Je m’aperçois alors que, comme les philosophes, ils prennent du recul, portent un regard curieux sur le monde, « le contraire du pli » comme dirait Zéno Bianu. Ils soulignent cet écart entre le possible et le réel, les mots et les choses, le désir et le quotidien.
Pour Reverdy, par exemple, la poésie c’est « du réel désiré qui manque », pour Guillevic, une rencontre fondamentale pour moi, « la poésie est une réponse qui interroge ».
Je suis frappée par la densité de la langue poétique : exprimer en peu de mots l’essentiel. Par exemple Guillevic : « plus par l’écriture, tu creuses. et plus tu débouches sur de l’ouvert » ou encore pour traduire l’état amoureux : « c’est partout le centre et j’y suis ». Tout est dit.
La poésie manifeste, comme la philosophie, une conscience du manque et de la liberté, mais pas de la même manière. Elle est plus du côté du désir que de la recherche ou plutôt elle ne les sépare pas, elle permet de « suggérer » disait Mallarmé l’ambivalence, comme dans les images condensées du rêve. Elle ne sépare pas le concept de l’affect. Et c’est vraiment ce que je recherche.
Faute de transformer le monde par le langage, on peut transformer l’émotion par le langage, grâce au travail sur la langue, grâce au rythme, essentiel, aux images, à la condensation, bref, en faire autre chose : trouver du singulier dans ce qui paraît identique. La polysémie du langage renvoie – en ricochets – sans cesse à des questions : le mot a une densité propre et en même temps, il renvoie à autre chose que lui-même.
C’est ce jeu-là que met en évidence le poète, dans cet « instant vertical » dont parle Bachelard qui révèle ce qu’on n’attend pas, « donne à voir » et à penser en même temps ; le poète ne dit pas, il fait, en utilisant les mots d’une manière spécifique.
Oui, la poésie est bien « une réponse qui interroge » « un perpétuel commencement » comme dit Bernard Noël.
Travailler dans la langue cette forme de questionnement, voilà qui m’intéresse. J’écris un premier livre chez Chambelland en 82, Visage à édifier. Se rencontraient là, alors, nombre d’auteurs assez peu conformistes – Yves Martin notamment, aux poèmes si forts – puis paraît un recueil dédié à ma fille : Lettre à L. et un autre au Dé Bleu, Même la nuit persiennes ouvertes. Plusieurs livres suivront dont certains avec des artistes peintres, Sarah Wiame, La lumière ébruitée, Le don des arbres, Chan Ky Yut, Revers des voix et un bilingue français grec avec Christos Makridakis, Rendez-vous Septembre. D’autres recueils au Pré de l’âge et au Pré Carré, Contre-ciel », Dimanche je vous aime notamment. Ensuite aux éditions Paupières de Terre : Silence à vif, Ces gestes en écho, « Un peu de jour aux lèvres. Enfin dernièrement deux livres aux éditions Bruno Doucey : Un lent dépaysage et Comme une promesse abandonnée où je m’interroge : « par quel chemin devenons-nous ce que nous sommes ? »
Alors ce récit d’itinéraire n’explique sans doute pas grand-chose.
La Pierre et le Sel : Quelle place occupe aujourd’hui la poésie dans ton existence ?
As-tu d’autres activités d’écriture ? D’autres activités de création artistique ?
Si oui, quelles sont les interactions avec l’écriture poétique ?
La poésie a pour moi une place très importante et j’ai toujours « pris » beaucoup de temps pour lire et écrire : deux activités fondamentalement liées pour moi, plusieurs heures par jour depuis presque 40 ans (sauf dans la toute petite enfance de mes enfants).
La poésie m’aide à vivre, avec sa dimension profondément humaine elle transfigure le quotidien. Aujourd’hui, je lis autant de philosophes, de Nietzsche à Jankélévitch, de Camus à Deleuze, Stiegler, Gori que de poètes aux écritures très différentes : de Roubaud, Gaspar, de Andrade, à Noël, Emaz, Jaccottet, Bonnefoy, etc. Je confronte les textes : lire les autres et écrire de la poésie, c’est entretenir une conversation.
Écrire un poème : partir de soi pour rencontrer l’autre, selon une forme particulière, dans un rythme qui vient du corps. C’est cette forme condensée, proche de la musique que je préfère aujourd’hui pour suggérer et creuser un peu plus les thèmes essentiels dans chaque livre écrit.
Écrire un poème, pour moi, c’est tenter chaque fois de créer un nouvel espace-temps où la durée s’arrête : le temps d’un écart, d’un « pas de côté ». C’est le plaisir de « prendre » l’instant en établissant un nouveau rapport au monde, en portant un nouveau regard sur le monde, unique, singulier. On est alors dedans/dehors, un instant inventé comme libéré du temps et pourtant dans le présent (nous dont le tragique justement est la conscience de notre finitude) à l’abri du monde et pourtant totalement lié à lui.
Surgit un instant « vertical » qui nous élève et recommence chaque fois qu’on écrit non pas dans l’illusion, mais dans une lucidité aiguë.
En écrivant un poème, on coïncide avec les mots, en cherchant le mot juste, on s’approprie la langue. D’où le travail nécessaire pour trouver sa parole dans la langue aux possibles infinis.
Le plaisir d’écrire vient parce qu’on éprouve ainsi notre liberté, on devient Sujet.
Vers le sud tu marches
dans la nonchalance des prés
tu deviens tu t’en vas
épouses le vol des cormorans
écartes les regrets la gravité des fables
ni les dieux ni les rois ne promettent plus rien
ils ont lâché le gouvernail
sans réponse édifier ton visage
en souvenir en rêve une main sur l’épaule
et s’ouvrait l’autre l’avenir
quelques mots sur les plaies
racines enchevêtrées
un difficile oubli
tu marches
comme si quelque chose de plus grand
toujours t’attendait
In Comme une promesse abandonnée, © Bruno Doucey, 2019, p.19
En écrivant de la poésie, on ne subit plus, on « donne à voir », on crée du « réel désiré qui manque ». Ce lieu-moment inventé, cet écart tu l’ouvres à l’autre et il peut, s’il le veut, te rejoindre par son imaginaire. Car si écrire c’est s’accompagner, c’est dans le même temps être avec l’autre. L’autre-lecteur est toujours déjà là quand on écrit, on en a besoin pour donner sens à ce qu’on fait.
Cette présence/absence on la sent bien quand on lit le poème de quelqu’un : il s’adresse à nous.
Pour moi, écrire de la poésie c’est parler aux autres non pour dire quelque chose, mais pour fonder un monde ensemble, nous qui sommes des êtres de langage, des êtres sociaux avec le pouvoir infini d’imaginer.
La forme poétique me paraît la plus juste pour traduire au plus près, dans toute leur ambiguïté, me semble-t-il, ces questions qui me touchent particulièrement. Celle fondamentale, par exemple, que pose Camus : « comment consacrer l’accord de l’amour et de la révolte ? » Thèmes que l’on retrouve tout au long de l’histoire de la littérature : le temps, l’amour, la révolte, le manque, l’enfance, la langue. Il faut chercher chaque fois une forme « neuve », différente, faire advenir une parole poétique qui ne tombe ni dans un formalisme totalement clos sur lui-même – si ennuyeux à lire même si cela est – ou paraît — profond parce qu’hermétique, ni dans un lyrisme sentimental, superficiel où l’on confond expression de soi et création. La surprise à tout prix, la provocation ne suffisent pas à faire un poème. De même l’image si jolie soit-elle (et surtout si elle l’est) le sentiment, si bon soit-il (et encore plus s’il l’est).
Pour moi, des jours et des jours de lectures, ratures, réflexion, silence sont nécessaires pour tenter de dépasser la simple expression, d’éviter le fabriqué, bref, élaborer un travail dominé, un chant contrôlé qui fera, s’il est réussi, écho et ouvrira un monde commun.
Difficile, mais si important, si jouissif aussi d’« articuler », comme dit Maulpoix, « le quotidien à la question ».
La Pierre et le Sel : Quels sont les poètes contemporains ou du patrimoine qui te sont proches par leur écriture ?
Quelle place accordes-tu à la lecture des autres poètes dans ton travail personnel ?
La lecture des autres poètes est donc fondamentale : on a tout à apprendre et tout à recevoir en lisant ceux que j’ai cités, un vrai plaisir ! Lire encore Guillevic, Ramos Rosa, Gamoneda, Char, James Sacré, Françoise Han, de Cornière, Jacques Ancet, etc. mais aussi des poètes moins connus que je découvre régulièrement en allant dans la librairie Anima à Montmartre depuis des années où la libraire amie me fait connaître des auteurs. Elle me présente chaque fois de nouveaux livres. J’ai pu lire par exemple, Antoine Mouton, Costaglioli, Christensen, Albane Gelé, Thierry Metz, Isabelle Pinson et tant d’autres ! On en discute après ensemble.
On ne pense pas tout seul, on a besoin d’échanger avec les autres évidemment.
Certains auteurs d’ailleurs nous parlent (que leur poésie soit proche ou non de la nôtre), d’autres non, car la poésie n’est pas un moyen de communication, mais un moyen de transmettre quelque chose dans lequel le lecteur peut se reconnaître, alors peut advenir, par le poème, un monde commun. C’est ce que je voulais dire en disant que la poésie est profondément humaine, qu’elle nous rend sujets. Sujet qui cherche sa parole, s’il écrit, et pour se faire a besoin de travailler une langue commune, sujet qui s’interroge, s’émeut, désire, se souvient, se révolte, bref qui n’adhère pas, et pour cela utilise la langue « de la tribu » d’une manière particulière, qui lui est propre, mais qui résonne chez l’autre.
Si on n’entendait plus
la répétition chantante des grillons
le rire du ruisseau sur les pierres
ni ce que murmure le vent aux branches
pour qu’elles plient sans rompre doucement
tout l’espace peu à peu emmuré
on irait jusqu’à ne plus voir les étoiles
ni les massacres à côté de nous
et l’on s’étonnerait de la mélancolie
qui nous prendrait de plus en plus souvent
quand le soir tombe
ce serait oui
une dépossession lente
étrangers à la terre à nous-mêmes
In Comme une promesse abandonnée, © Bruno Doucey, 2019, p.42
La Pierre et le Sel : Tu as déjà beaucoup publié. Quelle importance accordes-tu à cela ?
Tu as connu plusieurs éditeurs, quelle place accordes-tu à la relation avec eux ?
Je n’ai pas « beaucoup » publié, disons tous les 3 ou 4 ans en moyenne. Cela donne au bout de tant d’années une vingtaine de recueils. J’écris lentement et laisse plusieurs mois « décanter » mes manuscrits. Je les reprends, les relis, gomme, jette, supprime le « joli » par exemple, cherche obstinément le mot juste. J’aime vraiment fouiller la langue, creuser, oui, « caresser les mots l’un après l’autre » comme je dis dans Limites, « les serrer contre moi. »
Les rapports avec les éditeurs doivent être cordiaux, confiants. Pour que le livre aboutisse, on a besoin de réciprocité et donc de reconnaissance mutuelle. On a besoin aussi d’éviter toute prétention en restant lucide tant sur les limites du travail d’écriture que sur celles de la fabrication d’un livre.
J’ai lié une amitié profonde avec l’éditrice de Paupières de terre, Claire d’Aurélie, disparue beaucoup trop tôt.
Elle était passionnée par son métier, très respectueuse des auteurs. Elle aimait aussi « l’objet » livre et connaissait très bien le travail d’imprimeur, elle avait une grande culture poétique, une belle curiosité et un anticonformisme vital.
Claire était capable d’attention véritable pour les auteurs, d’une réelle générosité, elle se dépensait sans compter pour faire connaître les textes qu’elle aimait, elle avait un œil critique et bienfaisant à la fois. C’était stimulant de faire un livre ensemble. Elle a réalisé, tout au long des années, un beau travail d’artisan indépendant.
J’ai écrit : « à dire le réel, les mots manquent », j’ai pourtant commencé à publier il y a longtemps, d’abord donc chez Chambelland et après tout un parcours, mon dernier livre vient de paraître aux éditions Bruno Doucey. L’important est de tresser un fil ; un livre n’est pas un journal intime, il a besoin pour exister vraiment d’être lu donc publié, il prend sens, est fini par le lecteur. C’est lui qui lui donne toute sa dimension.
La Pierre et le Sel : Quelle est ton opinion quant à l’état de la poésie en France et particulièrement de la petite édition ?
Quelle importance accordes-tu aux revues de poésie ?
La poésie ne va pas si mal. Même si on constate un manque flagrant de moyens pour l’éditer et la divulguer (voir les disparitions de petites maisons d’édition, les difficultés pour que survive le marché de la poésie par exemple).
Elle trouve cependant un écho dans de nombreux lieux, lectures dans les cafés, librairies, festivals.
Disons que je m’étonne toujours qu’on s’étonne de constater que les médias, presse, télé, radio, etc. ne lui laissent pas la place qu’elle mérite.
Si la poésie nous rend sujet, nous invite à nous poser des questions, à nous émouvoir, à penser, à devenir nous même, bref à rompre l’uniforme, il est quand même naïf de croire que les médias de la société dans laquelle on vit aujourd’hui vont lui permettre d’avoir un large écho. Société qui marchandise tout, qui nous réduit (comme l’écrit Jabès : « nous mourrons ce qui nous réduit. ») et prône des valeurs opposées à la gratuité et au questionnement de la poésie.
De même, ne pas s’étonner de la « sélection » des maisons d’édition dites grandes. Le poète ne vend rien, en principe.
Le travail de défricheur revient ainsi à ce qu’on appelle injustement la « petite » édition de poésie. C’est elle qui permet ces rapports possibles, incertains, gratuits, si importants entre un auteur et un lecteur.
C’est elle aussi qui a du mal à survivre, vu le coût de la production éditoriale.
Je note par contre la « surproduction » actuelle d’une certaine littérature comme d’un certain cinéma, etc. Surproduction qui n’est que la caricature d’une démocratisation par ailleurs nécessaire.
Soulignons le travail de fourmi que faisait Claire d’Aurélie, sac à dos, sillonnant la France pour aller chercher des lecteurs ailleurs que dans l’entre soi ou celui que fait Bruno Doucey, colportant les textes parus au cours de lectures fréquentes devant des publics variés.
Les revues de poésie, elles, me paraissent vivaces, en tous cas multiples, mais là encore certaines disparaissent faute de moyens, comme les petites maisons d’édition. Elles présentent cependant des nouveautés et sont en ce sens indispensables à la vie de la poésie. Découvertes bien sûr de jeunes auteurs et confirmation également des trajets, des projets, nombre d’auteurs d’ailleurs y collaborent régulièrement. J’en fais partie.
La revue a une double utilité : permettre de se faire connaître en publiant ses propres textes puis de continuer à garder des liens, des échanges avec les lecteurs et permettre aussi en la lisant de découvrir des formes variées d’écriture, souvent très éloignées des nôtres, bref de lire des auteurs régulièrement, de les « suivre », et souvent d’acheter leur livre après lecture en revue.
La Pierre et le Sel : Utilises tu internet en relation avec la poésie ? As-tu un site personnel, un blog ? Consultes-tu ceux des autres ?
Je n’ai ni site ni blog. Disons que cela ne me correspond pas, ne m’attire pas non plus.
Je regarde de temps à autre des blogs comme effectivement La Pierre et le Sel, Poezibao, Terres de femmes, Canal-blog, De litteris, Levure littéraire, remue.net, Babelio, Le temps bleu, Sitaudis, etc. Je lis aussi les sites des revues que j’apprécie : celui de la revue Décharge, par exemple, Texture, les Hommes sans épaules, Arpa, Ent'revues.
Cela me permet de lire des styles tout à fait différents du mien et de me laisser quelquefois surprendre à apprécier des textes totalement loin de moi, ils m’ouvrent un autre monde, une langue différente.
Lumière d’avril
les jours sortent de l’ombre
tu respires l’âcreté de la terre
la sève par-dessous pousse sans relâche
efface ta fatigue dedans dehors mêlés
l’arbre de Judée s’enflamme et consume l’hiver
revient la saison des bouquets d’anémones
robes d’été et clins d’œil des jonquilles
les jours s’allongent allègent nos départs
la clarté le mouvement te portent
tu sarcles les herbes et les mots
ça continue ça recommence
toujours ça recommence
le temps nous brûle mais
on se fait croire au neuf de l’éternel retour
on l’espère on l’attend
comme on attend le thème en écoutant du jazz
lumière
lumière d’avril
rien que pour nous ça recommence
In Comme une promesse abandonnée, © Bruno Doucey, 2019, p.72
La Pierre et le Sel : Quels sont tes projets à venir ?
Beaucoup, comme toujours, cela me porte.
Un recueil à paraître avec une jeune graveuse, écrit déjà depuis plus d’un an, et un nouveau manuscrit en chantier. Je ne sais quand il sera « livre ». Sans doute pas avant 3, 4 ans.
Je collabore aussi par des textes à une anthologie qui va paraître à l’automne aux éditions Unicité et je prépare un livre d’artiste avec la peintre S.Touzery.
Projet également de lire encore de nombreux philosophes, après le magnifique livre de Wolff sur la musique que je viens de finir et terminer celui que je suis en train de lire sur le temps de Klein.
Relire Gorz, sa prose poétique fine et délicate pour exprimer le lien amoureux, Castoriadis, son analyse si actuelle de l’aliénation, sans oublier l’ironie, le « presque rien » de Jankélévitch. Bref, approfondir encore et toujours les questions qui me tiennent à cœur. Relire, bien sûr, en même temps, Guillevic, Emaz, Duault, Noël, Holappa…
Et, à part la lecture, et l’écriture, planter un autre lilas dans le jardin du midi, soigner les rosiers qui ont eu du mal à passer l’hiver et retrouver la mer et les amis comme chaque été en Sardaigne. L’été, quel beau projet !
Quand on prend le frais ensemble devant la maison
au mois d’août
en fumant lentement des cigarettes
le ciel jusqu’à tard dans la nuit
les étoiles filantes
s’en vont là-haut mourir
dans des jets de lumière
nos vœux les accompagnent
redessinent le monde pour la millième fois
nos destins nos amours
demain sera meilleur
bien sûr on veut y croire
l’étoile du berger en repère
on en oublierait presque
on vit moins longtemps que nos rêves
demain on sera partis nous aussi
surpris comme le gecko qui glisse sous la porte
nos vœux inaccomplis
en cendres nos cigarettes
resteront les « voix écrites »
des étoiles dans les yeux des enfants
grandis ils les raconteront peut-être
en franchissant le seuil
longues nuits lumineuses sous le ciel du mois d’août
In Comme une promesse abandonnée, © Bruno Doucey, 2019, p.102
Internet
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Contribution de PPierre Kobel
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