Alors que nous allons de nouveau devoir rester enfermés durant quatre semaines au minimum, chaque jour un texte pour dire la liberté des mots et la foi en l’avenir.
Elle avait sur le sein des fleurs de mimosa
Défit sa robe
Les attaches et lacets de ses dessous
La résille
Ses cheveux
La pelote de peine
Les nœuds dans les fils
La géométrie du prisme
Ouvrit le cercle des anamorphoses
Se jeta dans le feu
Le vent
La vague
Les neuf premiers mots venus
Elle traversa le mercure du miroir
Fut en sang
Sutura les plaies
Assainit le pus
Se pansa d’algues et sel
Surprit une mauve amerrie au bas du môle
Une phalène rousse sur un galet
Un lampyre bleu-jaune dans des glycéries
Sortit des fièvres rêveuse-et-sauve
Décousit ses paupières
Fit peau neuve
Sans perdre rien de son grain ni de sa silhouette
La toucha
S’en accommoda
L’écarta où là
L’éprouva par l’envers
S’y reconnut au détour d’une couleur sertie d’amour
La fit sienne
Des versets s’amuïssant refluèrent
Elle les dit et répéta
Les tut
Effaça
Les reprit à la limite de l’évanescence
Estima la
Mer
L’aurore bleue rehaussée d’orange et rose
L’éclat lumineux et sonore d’un feu têtu défait
La grêle-veuve-belle-en-bronze qui à l’entrée de la jetée
raccommode une voile envolée
La pointe de son aiguille
Les mesures de la laize
La résistance des videlles
Les pieds nus léchés par l’écume
La larme vert-de-gris coulée sur la joue
La mélancolie du jusant
Le cerf-volant rouge aux ocelles fauves
La frontière de la falaise et du vide
La fascination du vacillement
Le matin le midi le jour le soir
Vint la nuit
La nuit dans la nuit
Des lumières s’éteignirent
Hormis celles des amers
Seule et nue elle l’exhuma
Le mit en elle une dernière fois
Le brûla dans feu d’amour
Teignit ses accroche-cœurs et sourcils d’un peu de cendre
Et
Dispersant toutes les autres dans l’air et la mer
Elle décousit ses lèvres pour lui tout dévoiler enfin du mimosa
sur son sein
Mais
Elle s’était depuis si longtemps tue que les tissus s’étaient
confondus et les lèvres scellées
Ainsi
Résolue au silence
Faux-semblant livré à la palilalie du dernier présent
Elle prit la voile-de-la-veuve au vol
S’en couvrit
Surprit le plein dans les premières lueurs de l’aube
Et
Dans les bras des braises
Fit le lit d’un prochain murmure de la langue
In Elle avait sur le sein des fleurs de mimosa, © la tête à l’envers, 2018
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Contribution de PPierre Kobel
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