Un jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente et la colonne vertébrale qu’elle est pour aller au-delà du discours quotidien, du réel.
Clairières
Ton enfance grandit chaque jour. Ne la condamne pas.
Sève ou sang, la rivière est ton alliée.
Une feuille dit l’arbre, un mot renouvelle un visage.
Leurs regards amoindrissent tes gestes. Agis cependant, ne
serait-ce que pour susciter un envol d’alouettes.
Déploie ta fièvre, sécrète ton salut, sauve ton chant.
Fendre le nuage est parfois nécessaire.
Ta faim est l’alliée de ta marche. Ta soif dessine un paysage.
Irrigue tes pressentiments.
Marées secrètes, migrations silencieuses, que sais-tu de ta vie ?
La fougère connaît la rareté de la lumière. Comme elle,
peuple le murmure, respecte chaque saison.
Lisières du fruit, ta défiance s’endort. C’est l’aube.
Ignore la grêle des procès, vendange tes promesses. Tu
donneras le vin de tes mirages, et l’on t’en saura gré.
Ours, loup, chardonneret – toi. Ne choisis pas.
L’éclair des certitudes, la musique vaine des remords.
Ta patience a raison. Ton impatience aussi. Fiance-les.
La salive impure des journées peut submerger tes rêves, non les noyer.
Alterne l’orage et l’aurore, la prédation et la fuite, la pénombre et l’étoile.
Ne te réfugie pas.
L’invisible vent sur les hautes herbes, caresse et frisson. Le
regard aujourd’hui ne sera pas blessé.
Déploie ton doute, rassure ta lueur.
Un gnome qui est toi rit de tes élans. Ne lui accorde pas le
pouvoir de mesurer ton souffle.
Le vert de tes prairies d’enfance. Calciné mais non aboli.
Toute trêve est nourricière. Épouse l’adversité.
Une source renaît du matin. Accueille son chant. Sois l’oiseau de sa confiance.
In Naître au monde © Arpa no129-130, 2020
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Poésie maintenant, le blog de Pierre Maubé
Contribution de PPierre Kobel
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