La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Nuits au Frioul
Les grillons ces soirs-là chantaient
Dans les champs du Tagliamento, dans la vaste,
Mort des terres. Et Casarsa parut à l’horizon,
Flamboiement de voix et de cris, refuge clos
Pour ses habitants.
Églises désertes, et cheminées
Éteintes, outils abandonnés, j’ai vu, libéré,
Frioul, le grommellement de tes enfants.
Avec eux j’ai tramé de vieilles intrigues amoureuses.
J’ai couru les routes ; ici, San Vito avec ses maisons blanches,
Là Floreano, si chaud derrière les haies.
J’ai su que l’heure ne fuit pas et que les années
Demeurent toujours les mêmes sur le rire qui ne change pas
de ces gens en fête, sur ces amours
Que n’orne que le chant des grillons
Entre de vieux murs et une solitude emprisonnée.
Ainsi, dans le tremblement d’une guitare et les cris
D’un enfant soudain proche,
Je me suis abandonné, ô mon village, aux nuits
De ton histoire.
Et cependant l’ombre distante
Des collines était zébrée d’éclairs qui rappelaient
Que ni la pluie ni la bourrasque ni la dureté
De l’hiver ne sont des dons ingrats.
In Pier Paolo Pasolini Adulte ? Jamais Choix de poèmes et présentation par René de Ceccatty - © Seuil, Points, 2013
Internet
-
Wikipédia | Pasolini
Contribution de PPierre Kobel
Commentaires