La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. »
Montaigne
Un texte pour dire la poésie,
voyager dans les mots, écrire les espaces,
dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente.
Pour se laisser ravir et ravager.
Benjamin Guérin
Nous avons rejeté au loin le sauvage
ouvrant des champs comme des villes
alignant des ruelles où l'on plante de l’herbe
la meilleure pour les vaches toujours la même
la plus verte et la plus efficace
il ne reste d'arbres que des friches
et des champs de bois alignés
en rang comme des vignes
ils attendent l'appel
pour être fusillés
au jour dernier
de la coupe franche
on a mis les forets en ordre et en ligne
comme des places de parkings
à durée limitée
oubliant le temps des arbres
on a exproprié les fantômes et les fées
on a disséqué
la nature enchantée
*
Mème les loups ont fini par apprendre
à marcher sur des ponts
dans l’ombre des caméras
de télésurveillance
ils se retrouvent le soir
aux sorties d'autoroute
traversent le monde
sans jamais se faire voir
en retrait sur les bandes
aux arrêts d'urgence
invisibles et présents
ils ramènent la mémoire
des libertés sans âge
dans les recoins bitumés
là où fleurissent encore
les dernières fleurs sauvages
In Quand nous étions des loups, © Revue la forge | éditions de Corlevour, 2024 avec des illustrations de Robert Lobet
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Occitanie livre et lecture | Benjamin Guérin
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Contribution de PPierre Kobel
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