René Rougerie fondateur à Limoges en 1948 des éditions qui portent son nom a installé sa maison en 1956 dans la cité médiévale de Mortemart, en Haute-Vienne.
Décédé en 2010 à plus de quatre-vingts ans, il a consacré sa vie à la poésie, la sienne, et principalement, à celle des autres comme passeur et éditeur. C’était un homme discret et modeste qui se définissait lui-même comme commis voyageur de la poésie.
Il a transmis à son fils Olivier les commandes de l’atelier qui poursuit aujourd’hui l’édition d’une poésie de haute tenue, dans la tradition familiale, fabriquée avec du matériel typographique à l’ancienne.
Selon son fondateur : « Rougerie n’est pas une école, c’est un jardin où l’on trouve toutes les couleurs et toutes les formes d’une poésie de chair et de sang, mais aussi une pensée rigoureuse, entre sensibilité et intelligence. »
Georges Chatain, journaliste à l’Écho du Centre, fait de lui, dans son journal à la date du 9 décembre 2011, la description suivante :
[ (…) René Rougerie est jeune journaliste à la Libération, au Populaire du Centre que dirige son père. Il y rencontre les écrivains Georges-Emmanuel Clancier et Robert Margerit. Il crée avec eux une revue Centres « avec un s pour bien montrer que nous n’étions pas une revue régionaliste » : textes de Max Jacob, Raymond Queneau, Joël Bousquet, Daniel Kahnweiler, dessins de peintres, comme ceux du cubiste Albert Gleizes…
Il démissionne du journal en 1948, lorsque, après les combats de la Résistance et les enthousiasmes de la Libération, il voit y revenir « les collaborateurs et les attentistes ».
Et il s’investit totalement dans l’aventure de l’édition poétique, un lieu de rencontres et de confrontations joyeuses, jusqu’à l’arrivée de son fils Olivier qui lui succède et poursuit aujourd’hui pleinement cette aventure éditoriale.(…) ]
Et de son côté, Lucien Wasselin, dans le numéro du 12 janvier 2011 de la Tribune de la Région Minière, décrit ainsi le parcours de cet inconditionnel de la poésie :
(…) « René Rougerie, dans ce domaine, n’a pas ménagé sa peine, il a farouchement défendu son indépendance quitte à le payer cher. René Rougeriea donc voulu maîtriser tous les maillons de la chaîne : il choisissait (avec ses proches) les poètes qu’il éditait, il devint typographe (il acheta d’occasion le matériel et il mit les mains dans le cambouis comme on dit), il diffusait lui-même les livres qui sortaient de son imprimerie. Il n’a jamais voulu dépendre des banquiers et autres requins de la finance qui n’investissent dans une activité que pour en toucher rapidement les bénéfices.
La seule activité qu’il ne mena pas fut celle de libraire, ce qui ne l’empêcha pas d’être présent dans de nombreux salons pour vendre directement ses ouvrages.(…) »
Ayant une haute idée de la littérature, celle qui traverse le temps, il n’a jamais voulu mettre ses livres au pilon, conscient que certains d’entre eux ont besoin, comme le bon vin, de mûrir dans le silence et la pénombre.
Par ailleurs, Yves Prié, dans le numéro n°54 de Plein chant indique :
« (…) Les époques décadentes ont toujours cultivé le faux-semblant, l’éphémère et l’inauthentique. Notre paysage éditorial est à l’image de l’époque, et c’est bien là la raison de la crise du livre dont on nous rebat les oreilles : ce sont bien la civilisation, la culture qui sont en crise. Heureusement quelques individualités dans leur sphère résistent, explorent d’autres voies, sans bruit, sans cohorte de thuriféraires. René Rougerie est de ceux-là et c’est la leçon essentielle de son expérience. Il ne disserte pas, ne disperse pas son temps en médiatisationsIl ne disserte pas, ne disperse pas son temps en médiatisations inutiles, il fabrique des livres, il crée. Car c’est bien d’une œuvre qu’il s’agit lorsque l’on croise un tel catalogue. Le livre, la création littéraire sont aujourd’hui confrontés à un phénomène qui vaut bien des censures : la loi du marché. Siceux qui ont encore le souci d’une création authentique laissent faire, elle n’aura bientôt plus de lieu pour s’exprimer. Il a été salutaire qu’une aventure comme celle de René Rougerie existe, parmi d’autres, bien sûr, mais celle-ci a d’exemplaire qu’elle dure – et durera par Olivier – et qu’elle en a suscité d’autres. Je ne peux que leur souhaiter la ténacité dont a fait preuve René Rougerie. »
À ce jour, les éditions Rougerie sont à la tête du plus beau catalogue de poésie contemporaine, avec près de 1400 titres en stock. Connues pour être l’éditeur de Saint-Pol Roux, Pierre Albert-Birot, Joë Bousquet, Boris Vian, elles ont aussi publié des textes inédits de Victor Segalen, Pierre Reverdy ou Max Jacob. Mais, surtout, elles continuent de publier de jeunes et moins jeunes poètes comme Olivier Deschizeaux, né en 1970, Yves Prié, né en 1953, Pierre Bacle, Jean-Luc Peurot, ou Yvon Le Men, dont le recueil Chambres d’écho a été, il y a quelque temps, lu par l’acteur Denis Podalydès.
Coordonnées
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Éditions Rougerie
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Responsable : Olivier Rougerie
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7 rue de l’ Échauguette 87330 MORTEMART
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Tél. : 05 55 68 00 93
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Fax : 05 55 68 96 89
Internet
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Le site de l’édition, avec une grande facilité d’exploration en cliquant sur l’un des bandeaux en haut de page.
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Une vidéo, entretien avec Olivier Rougerie
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Un article de Bernard Mazo sur Rougerie, dans la revue Texture.
Contribution de Jean Gédéon
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