Alors que nous allons de nouveau devoir rester enfermés durant quatre semaines au minimum, chaque jour un texte pour dire la liberté des mots et la foi en l’avenir.
Mireille Fargier Caruso
De loin la chaise...
De loin la chaise longue dépliée il est là allongé les yeux clos
aucun bruit tu t'arrêtes au bout de l'allée en cet instant tu sais
dernière fois dernière après-midi dans le jardin
chaque année en vacances un peu de vent en haut des branches
les hirondelles revenues il est là et tout le grand poids du temps
qu'on voudrait endiguer avec la mer des larmes au fond de soi
il croise les bras au-dessus de sa tête d'un mouvement familier
combien de fois encore saisiras-tu son geste ?
tu lis sur son visage une fatigue une absence déjà loin de nous loin
de tout tu bascules de l'autre coté avec un creux dedans après-midi détruit
qu'on nous donne au moins un délai revoir avec lui la neige de printemps
tu étais dans le rayonnement du mois d'août et tout à coup
plus d'échappée ça chavire dans le calme du jour t'envahit toute la futilité
de cet après-midi passé en ville à choisir une robe d'été loin de lui
tassée tu retiens ton souffle voudrais
retenir le temps tu devines les feuilles mortes au bord du silence
fermés l'été et le ciel de l'enfance à jamais
en arrêt engoncée dans la fin si proche tu descends
pauvres humains qui après nous vivrez il ne te reste
que la fragilité des paroles à partager encore ensemble en signature
tu t'avances vers son accueil son sourire – disparaîtra aussi ? –
le recueillir très fort sous tes paupières le garder vivant en mémoire
comme on dit mais c'est pas du vivant après ça ne peut plus changer
et toi tu ne peux rien même pas en cette fin d'été
ne pas être dans l'attente de vivre
In Un peu de jour aux lèvres © Paupières de terre 2010
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La Pierre et le Sel | Entretien avec Mireille Fargier Caruso
Contribution de PPierre Kobel
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