La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Coleman Hawkins
Soudain
Il ferme les volets roses d’aubépine
Les yeux clos
Le voici qui dérape au guidon de son saxophone
Il brûle
Du mal des Ardents
Et du parfum des corolles de chair
Il poursuit l’ombre de son ténor
À coups d’uppercuts caressants
Shadow-boxing de la nuit
Ses doigts express effeuillent à tout vent les marguerites du métal
Encore
Encore un
Encore un chorus, Coleman Hawkins
Il reprend en soufflant plus fort
Renoncules tendres de ses paupières
Encore un refrain juteux
Swing it, Coleman
Et il balance de possession
Revenu des grands fonds de Body and Soul
Il se balade très haut
Avec les anges invisibles de la frénésie
L’air manque
Danse de Saint-Guy du black-bottom
Vite un casque pneumatique
Au loin
La terre est minuscule
Encore un octave plus haut
Donnez-moi le bémol de cette teinte orange
Au glissando des cuisses bronzées
Contre-ut gratte-ciel
Et tout à coup du fond des siècles
Ton saxophone est vide dans tes mains
Maintenant l’aurore peut se lever sur Manhattan
Coleman Hawkins a ouvert les yeux
Et il regarde comme les anges musiciens de Saint-Bavon.
In Le voleur de feu, © Éditions universitaires, 1950
Internet
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Wikipédia | Robert Goffin
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Wikipédia | Coleman Hawkins
Contribution de PPierre Kobel
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