La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Le sel du soir
Je flotte tel un noyé parmi des regards étrangers
oiseau du froid à travers des neigées méconnues –
si l’ombre est un manque
rêvant des choses sous lesquelles elle s’écoule, quel soleil
remplit mon cerveau de souvenirs – mes ombres intérieures –
quelle main perd, sombre, ses syllabes
sous les fantômes des étoiles
et quelle bouche perd, fanée, son regard dans un geste ?
Le sourire me regarde depuis l’herbe comme le serpent biblique
mais hélas, je ne suis pas à même de deviner sa tentation
inconnu reste pour moi son dessein subtil
peut-être le serpent est-il le sourire noir que Dieu a perdu
en se promenant
le dessein ténébreux d’un dieu d’obscurité
entouré d’anges châtrés…
En me couchant, j’ai mis mon diamant vivant
en hiver d’herbe devant le serpent noir
et l’ai enseveli dans le sel du soir –
le diamant de la connaissance extatique et de la vie –
je l’ai mis en corps obscur, moi, l’arbre d’ombre de l’oubli,
et caché dans l’amnésie, j’ai commencé à flotter
tel un noyé parmi des regards étrangers,
objet incompréhensible
qui ne se rappelle de soi que l’altérité
In Fenêtre avec esseulement, © L’Harmattan, 2014
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Contribution de PPierre Kobel
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