Jusqu’en 1928, Sète était Cette, mais déjà elle comptait parmi ses habitants un jeune garçon bagarreur et plein de vie qui appartient aujourd’hui au patrimoine de la ville. Elle fête cette année le centenaire de la naissance de Georges Brassens. On le retrouve partout et jusque sur les murs comme cette fresque peinte à quelques pas de sa maison natale.
Brassens aimait la poésie, il chanta les poètes, de François Villon à Aragon en passant par Victor Hugo et Paul Fort. Les textes de ses chansons ont une teneur poétique et la liberté iconoclaste, provocante de ses textes est celle qu’on attend des poètes.
De rencontre en rencontre, je rejoins mon propos des jours précédents sur le rôle et la force de la parole poétique. J’écris cela en écoutant l’ami Stéphane Bataillon dire comment cette parole peut libérer. Il évoque ce jeune garçon rencontré durant une animation pédagogique, replié dans une attitude victimaire. Sachant profiter de sa présence et de ses textes pour dire devant les autres la perte de son père, il entama alors une reconstruction de lui-même.
C’était hier matin le poète roumain Valeriu Stancu qui disait avec une distance savante et une profonde humanité comment il avait échappé à un crash aérien, comment les mots accompagnaient cette survivance. C’était hier soir Serge Pey dans la rue Gambetta, regrettant que l’absence de micro l’empêche de donner une radicalité pour lui nécessaire à sa lecture quand, à son insu, cette absence le mettait à hauteur d’homme sans rien enlever de ce qu’il a l’habitude de projeter à la face du monde. C’était ce matin Patrick Dubost délivrant la combinatoire de poèmes qui interpellent avec humour et gravité mêlés. Encore là la mort, l’amour, l’essentiel.
L’essentiel ? Je reviens à Stéphane Bataillon qui a enquêté sur cette notion pour découvrir qu’elle tient au contact avec l’autre, à la rencontre et à l’échange. Toutes valeurs que propose la poésie.
Ici elle court les rues, parole jeune et ensoleillée comme l’été, pour conduire aussi à autrui
Rodin Kaufmann (France/Occitanie)
Je traverserai le tunnel
Je traverserai le tunnel
Et je danserai sinon nous sommes perdus
Et je le ferai pour toi
Plus que pour la coutume
Car dans l’obscurité et le trouble
Je t’avais choisie comme lumière
Je laisserai les heures sombres
Au-delà du pont de bois
Je suivrai la vague lueur
Car j’en ai assez des luttes sans goût
Contre la pénombre
Je traverserai le tunnel
Du temps sans toi
Fût-il de cent ans et qu’au-delà nous soyons deux
Je passerai le détroit qui nous lie
Car être trois attise
Ma tristesse et je suis las
Ici s’écrit ce qui compte le plus
C’est que la croyance sans doute
Et l’amour sans ombre
Méritent la route même longue
Pour aller trouver au fond de la source
La goutte douceur dans laquelle nous nous voyons tous les deux
In Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée – Anthologie Sète 2021, © Bruno Doucey, 2021
Internet
Contribution de PPierre Kobel
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