La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Bernard Manciet
Quand l’œuvre est achevée mais laquelle jamais ?
il manquera toujours dans la salle chaulée sonore une parole
encore et le dernier murmure du mourant dans sa morve
quand Dieu n’en finit pas de son infinité
il manque ton regard — Pierre ! — du plus profond
de la mort élevé jusqu’aux pleurs endormis
il faut donner la vie à qui nous la devons
– mais où en suis-je ? — hauteur du nu
où mourir libre « Nul ne prendrait la vie
que je répands de moi-même
et retire comme il me plaît » Haleine
– liberté aux hommes et paix à Dieu —
je plonge mon bras dans ce souffle
comme dans une mesure d’avoine
les deux mains comme les femmes dans la couette
ou comme dans la vache on va chercher le veau
je suis descendu au fond du cœur
un Dieu dans les dessous du sable comme les piquets dans la mer
nous le tenons enfin cet homme dont le germe est le nom
dans le cinquet de ruse la main sent le père
– « je mets mon âme – Père – entre vos mains » –
dans le filet comble de poissons luisants
se trouve le vivant fuyant et glissant
et de mon âme Père vous êtes bercé comme par la cardeuse
votre source est bercée
de terre – tout est devenu terre et l’âme chair
chair du beau temps qui croule comme le froment
il croule du froment il croule de la terre
et Dieu est sauvé
comme on tire un filet des lueurs des vagues
ciel de poissons on dirait liberté d’écailles
nous tirâmes la pleine mer
Extrait de Lacrimosa. Les Sept Paroles du Christ en croix in L’Enterrament a Sabres, © Mollat, 1996
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Contribution de PPierre Kobel
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