La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Souillée jusqu’au bassin de verve masculine
Je me lève digne pour me sécher
Dans le calme du jardin
Sous les étoiles témoins mes pores
Creusent jusqu’aux tambours lointains
J’appelle
Tout ce qui me fera approcher
Mon histoire aux jambes coupées
Comme celle de Mamie
Cette histoire noire
Oui
Noire
Que j’effleure souvent par hasard
Grâce à la hargne la patience l’endurance et le courage
Des braves de la mémoire
Cette histoire sèche où les crimes s’entassent
Dans les sols bien plus garnis que les rayons sages
Des bibliothèques chauffées sous la neige
Cette histoire qui m’arrache des soupirs
Venus de si loin que dans ma lignée
Certaines gorges ont perdu le goût du présent
Cette histoire de sueur et de femmes debout
Debout et enfantant debout et se battant
D’une résilience à couper la chique aux scénaristes
bien-être
Cette histoire-là nous regarde
Que tu la prennes ou non
Que tu l’embrasses ou non
Que tu l’aimes ou non
elle te regarde avec sang-froid
Lucide et forte
Cette histoire-là vaincra
La lâcheté n’a pas assez de poids
Pour venir à bout de la révolte enflammée des mornes
Il y aura toujours une faille où elle germera
Cette histoire-là
Que tu sois d’accord ou non
L’Histoire s’en fout
Elle est plus vaste que nous
Je ne veux agresser personne
Je sais trop ce que c’est
Si aujourd’hui j’écris ça
Si maintenant je te dis ça
C’est parce qu’avec cette histoire
En dehors de moi
Je me restaure
Et te tends les bras
In Au bord du bord, © Bruno Doucey, 2022
Internet
Contribution de PPierre Kobel
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