La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. » Montaigne
Chaque jour un texte pour dire la poésie, voyager dans les mots, écrire les espaces, dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente. Pour se laisser ravir et ravager.
Christopher Falzone était très beau. Sa femme
l’appelait mon prince et quand elle le désirait
c’était mon prince de velours ou petit Chopin.
Sa femme, parlons-en, était russe, russe et rusée.
Mais non pas du tout disait Christopher dans ses lettres
mon lilas – oui, en français : mon lilas – parfois mauve
parfois blanc, en réalité Liliya était son prénom
elle n’est pas du tout rusée. Pourquoi voudriez-vous
qu’elle le soit ? Vous dites cela uniquement
parce qu’elle est plus âgée que moi de vingt ans
et qu’elle organise tout pour moi :
Ottawa, Cleveland, Detroit, Edimbourg, Londres,
Nantes, Verbier, je signe en bas de page c’est tout.
Liliya, mon pain chaud, ma mie blanche,
mon soleil capturé dans les pierres des bancs
des squares de centre-ville ou des bords de mer,
mon ramage sombre d’orme de montagne
mon rideau de théâtre ouvert sur l’inconnu.
In Tombeau de Christopher Falzone, © L’herbe qui tremble, 2018
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Contribution de PPierre Kobel
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