La poésie « est au-dessus des règles et de la raison.
Elle ne pratique point notre jugement ; elle ravit et ravage. »
Montaigne
Un texte pour dire la poésie,
voyager dans les mots, écrire les espaces,
dire cette « parole urgente », cette parole lente, sa liberté dissidente.
Pour se laisser ravir et ravager.
Michèle Gautard
Je ne suis pas,
Je ne suis pas morte et j’écris sur la mort
Je ne suis pas noire et j’écris à l’encre noire la beauté d’une peau noire dont les reflets lumineux éclairent mes pages blanches
Je ne suis pas japonaise et j’écris sur la souffrance des hibakushas
À devenir Hiroshima dans la douleur de pages uranium
Je ne suis pas scientifique et j’explore les mystères des matières et m’interroge sur la matrice de l’univers
Je ne suis pas philosophe et remplis des carnets sur l’essence de l’être
Je ne suis pas un homme et me glisse dans leur chair, à faire paître sur mes pages la puissance de leurs désirs ; à l’unisson de toutes ces passions qui unissent les êtres de tous les sexes.
Je ne suis pas un homme, mais fais miennes leurs larmes et les accompagne dans leur souffrance ; à scier les barreaux de leurs prisons où les dictateurs et bourreaux les incarcèrent, les torturent. Et lorsqu’ils les tuent ou les font disparaître, comme ils le font aussi avec les femmes, je deviens ce fil de la mémoire où les corps n’ont plus de sexe, où les peaux n’ont plus aucune couleur, où les cendres demeurent la synthèse de l’histoire humaine,
Immensité des espaces inconnus
Au-delà des peaux et des mots
Des sexes et des genres
Liberté où l’universalité redonne à chacun Sa part et ses droits
Richesse des partages
Ne pas entrer en esclavage
D’être ou ne pas être
Quelle que soit sa couleur
La censure demeure censure
Quel que soit son sexe
Exclure c’est exclure
« Liberté, j’écris ton nom »
J’emprunte ces vers
Le temps d’un éclair
Pour qu aucune chaîne qui se libère ne devienne celle de l’autre
Pour que les victimes d’hier n’utilisent pas les armes de leurs bourreaux
« Liberté, écris ton nom »
Pour que jamais rien en ton nom ne soit altéré.
In Journal de cendres, © Unicité, 2024
Internet
Contribution de PPierre Kobel
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